Il aimait se comparer à un ours
« Je suis ours et veux rester ours dans ma tanière, dans mon antre, dans ma peau, dans ma vieille peau d’ours, bien tranquille et loin du bourgeois et des bourgeoises. » lettre à sa sœur Caroline.
Mais on ne nait pas ours, c’est bien connu, on le devient.
Comment un jeune bourgeois, qui s’apprête à faire son droit pour se conformer aux attentes de sa classe sociale et ne pas décevoir le Père, devient-il un ours ? Comment et pourquoi ?
Que nous reste-t-il de la bête pour élucider le mystère ? Eh bien la peau justement, qu’il nous a laissé, avec ses plis et ses replis ; sa correspondance.
Alors de lettre en lettre, la comédienne va se faire détective, exploratrice et nous délivrer les secrets de cette métamorphose, oh certes pas kafkaïenne mais tout aussi étrange. Et nous découvrirons sous la peau de l’ours un homme de chair, de sang, d’âme et d’esprit, un lutteur, un acharné, un amoureux, un amant, un fils, un ami, colérique, érudit, passionné, passionnant ; et si drôle.
Ours, Flaubert ! Mais si finement léché, entomologiste de son temps, nul mieux que lui ne saura, pour affronter le nôtre, nous armer de patience, de lucidité, de fidélité et d’humour.
« Les gens légers, bornés, les esprits présomptueux et enthousiastes veulent en toute chose une conclusion ; ils cherchent le but de la vie et la dimension de l’infini. Ils prennent dans leur pauvre petite main une poignée de sable et ils disent à l’Océan : « Je vais compter les grains de tes rivages. » Mais comme les grains leur coulent entre les doigts et que le calcul est long, ils trépignent et ils pleurent. Savez-vous ce qu’il faut faire sur la grève ? Il faut s’agenouiller ou se promener. Promenez-vous. » A Marie-Sophie Leroyer de Chantepie,18 mai 1857
« A partir de ce soir où tu m’a baisé sur le front je me suis juré à moi-même de ne jamais te mentir. C’est le procédé le plus rude, le plus brutal, peut-être le moins tendre, diras-tu ? Mais je crois que ce serait te mépriser qu’agir autrement, et t’avilir même. Tu n’es pas faite pour être servie par un amour faux et grimaçant. J’aimerais mieux te faire une balafre au visage qu’une grimace derrière le dos. » A Louise Colet, 26 août 1846
« Le siège de Carthage que je termine maintenant m’a achevé. Les machines de guerres me scient le dos ! Je sue du sang, je pisse de l’huile bouillante, je chie des catapultes et je rote des balles de frondeurs. Tel est mon état. » A Jules de Goncourt 27 septembre 1861
Spectacle : 1h
Mise en scène : Benjamin Moreau
Comédienne: Rachel Da silva